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10 mai 2007

Sarkozy et la délinquance (Le Monde daté du 10 Mai 2007)

Des chiffres contestés sur la délinquance
PROPOSITIONS Réforme des institutions


«Une nouvelle loi d’orientation
Ce n’est guère une surprise, Nicolas
Sarkozy veut poursuivre l’action
entreprise au ministère de l’intérieur.
Il souhaite l’adoption par le Parlement,
dès 2007, d’une nouvelle loi
d’orientation, après celle d’août 2002.
L’un des objectifs serait de réaliser
un nouvel effort pour l’équipement
des policiers en sécurité publique.
Le candidat de l’UMP veut encourager
le développement des armes
« à létalité réduite », comme le pistolet
à impulsion électrique ou le flashball.
Il souhaite que les patrouilles soient
équipées, à bord des voitures,
d’une caméra vidéo destinée
à filmer leurs interventions,
afin de prévenir toute polémique
sur ces dernières.
Les 16-18 ans jugés comme des majeurs
Pour les multirécidivistes, M. Sarkozy
réclame des peines planchers ; pour les
mineurs récidivistes, une révision
de l’ordonnance de 1945 qui permettrait
de juger les 16-18 ans comme
des majeurs. Des jurys populaires
seraient mis en place dans
les tribunaux correctionnels.
La vraie nouveauté pourrait venir de l’organisation
de la sécurité. M. Sarkozy veut
réaliser deux projets qu’il envisage depuis
plusieurs années : un rapprochement plus
étroit entre la police et la gendarmerie,
cette dernière conservant le statut militaire,
et la fusion entre les renseignements
généraux (RG) et la direction de la
surveillance du territoire (DST) au sein
d’une grande direction antiterroriste. a
(Samedi 10 mars.)
Nicolas Sarkozy a affirmé, jeudi
8 mars, sur France 2 que « 5 %des
délinquants font 50 % des délits ».
Une affirmation contestée, car elle n’est
pas confirmée par les statistiques. Le
ministre s’appuie sur une étude sociologique
menée, en 2001, par Sebastian Roché
sur la délinquance autodéclarée par les
jeunes, première recherche de ce genre
en France. Ces résultats avaient été popularisés
par la commission d’enquête sur
la délinquance des mineurs du Sénat, en
2002. Ils ont, depuis lors, nourri la thèse
de l’existence d’un « noyau dur » de la
délinquance.
M. Roché avait questionné 2 300 jeunes
de 13 à 19 ans des agglomérations de
Saint-Etienne et de Grenoble. Auditionné
au Sénat, en mars 2002, il avait livré sa
conclusion : « On trouve une très forte
concentration de la délinquance sur un petit
ensemble de personnes. » M. Roché faisait
alors référence à « la théorie des 5 % ». Il
précisait : « D’après les jeunes auteurs de
délits eux-mêmes, il y a bien 5 % qui pèsent
60 %à 85 %du total des actes. »
Le rapport sénatorial avait généralisé
ce résultat, devenu une sous-tête de chapitre
intitulée :« Une délinquance concentrée
: la théorie des 5 %. » Au cours de
leurs auditions, les sénateurs avaient
pourtant entendu un point de vue divergent.
Le procureur de la République d’Annecy
avait, pour sa part, indiqué : « Il
convient de moduler l’idée selon laquelle ce
sont toujours les mêmes mineurs délinquants
qui sont interpellés. » Le magistrat
s’appuyait sur des chiffres : « En 2001, le
commissariat d’Annecy a interpellé
314 mineurs ; 286 l’ont été une seule fois,
et 28 à plusieurs reprises. »

« Noyaux “suractifs” »
Le candidat de l’UMP extrapole les
résultats de M. Roché à l’ensemble des
délinquants, à l’appui de sa propositionphare
en matière de justice pénale pour
la présidentielle : l’instauration de peines-
planchers automatiques pour punir
plus durement les récidivistes. Selon l’entourage
du ministre, « l’existence de jeunes
suractifs dans la délinquance est une
évidence, constatée par les policiers comme
les magistrats ». Mais la France ne dispose
pas des outils statistiques qui permettraient
de conforter l’estimation de
M. Sarkozy.
Pour M. Roché, le ministre commet
une « erreur de présentation » : « J’ai parlé
de 5 % d’une classe d’âge et non de 5 %
des délinquants qui ont déjà commis un
délit », précise-t-il. « Si on prend ces derniers,
5 % des auteurs sont responsables de
30 % des délits (…). M. Sarkozy a le mérite
de mettre le doigt sur un vrai problème,
mais ses conseillers sont allés un peu vite. »
Le sociologue ajoute que la notion de
« noyau dur »de la délinquance est trompeuse
: « Ce n’est pas parce qu’on détruirait
ce noyau qu’on serait débarrassé du
problème. Il s’agit plutôt de noyaux
“suractifs”, dans lesquels des jeunes entrent
tandis que d’autres en sortent. »
Le problème tient à la mesure de la
délinquance.En 2006, « la police n’a identifié
les auteurs que de 34 infractions sur
100, elle ne sait donc pas qui a commis
66 % des infractions », explique le juge
Serge Portelli, qui a décortiqué le bilan
de M. Sarkozy au ministère de l’intérieur,
chiffres à l’appui, dans un livre à paraître.
« Il est donc impossible d’affirmer que
50 infractions sur 100 sont commises par
des récidivistes, que donc 1 862 794 crimes
et délits sont de leur seul fait », ajoute
M. Portelli. L’enquête de victimation
menée par l’Insee, en 2006, montre que
la délinquance dont les personnes se
déclarent victimes est trois fois supérieure
aux chiffres officiels.
Quant à la récidive, « telle qu’elle est
définie par la loi, elle ne représente que 5 %
des condamnations prononcées par les tribunaux,
et elle n’augmente pas », indique
le magistrat, appelant sur ce sujet à
« mobiliser l’intelligence plutôt que la
peur ».a
Nathalie Guibert
(Mercredi 14 mars.)

Erreurs et amalgames
sur les récidivistes

(Mardi 16 janvier.)
«
PROPOSITIONS Sécurité et délinquance
(…) DÉFI pour l’appareil judiciaire, la récidivenes’aggrave
pas.Lesrécidivistes représentent
une condamnation sur vingt, crimes
et délits confondus. Pour les crimes,
84 personnesontétécondamnéesenrécidiveen2004.
En2000: 117.Lenombredesortants
de prison condamnés pour viol et
agressions sexuelles qui commettront un
nouveau crime (sexuel ou non) dans les
cinq ans s’établit à 40. Cinq ans après leur
sortie, 11 % des agresseurs sexuels retrouvent
la prison ferme, mais 22 % des trafiquants
de drogue, 57 % des auteurs de vol
avec violence, 65 %des simples voleurs.
Les candidats évitent le coeur du
débat : la récidive, qui varie de 0 % à
100 % selon les actes commis et le parcours
des individus, appelle des solutions
concertées entre médecine, justice
et travail social. Des rapports récents ont
montré qu’aucune politique nationale
n’a jamais été élaborée en matière de prise
en charge des personnes dangereuses.
Les professionnels estiment que les lois
existantes suffisent – la dernière a été
votée en décembre 2005 –, mais que les
moyens de les appliquer font défaut.
Créé en 1998, le suivi socio-judiciaire
des délinquants sexuels à leur sortie de
prison (1 000 mesures en 2004), bute sur
la pénurie de médecins dans et hors la prison.
L’obligation imposée à un nombre
croissant de condamnés de pointer dans
les commissariats se heurte, elle, aux
moyens policiers. La justice compte
2 500 conseillers d’insertion et 350 juges
d’application des peines pour suivre
200 000 condamnés.a
N. G.
(Vendredi 4 mai.)

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